Récits de vies
Dans les années 50, c’est sous le ciel bleu de Madagascar que leurs parents ont transformé leur ancien pigeonnier en deux pièces pour diverses activités. C’est là que tous les jeudis : ils se retrouvent en tant qu’enfants pour réviser et apprendre les leçons. Selon les circonstances, les pièces ont été utilisées pour le repassage, pour un petit bricolage, pour recevoir des visiteurs, pour jouer lorsqu’il pleut ou quand il fait trop chaud, pour garder certains aliments conservables sans réfrigérateur. De toutes les façons à l’époque rares sont les familles qui en possèdent.
Un lieu de développement car leur mère a invité le frère aîné et Julia Art’Malala à consacrer deux après-midi par mois à lire et à écrire ensemble. Seulement pendant l’année scolaire. Des heures intenses mais toujours plein de joie, de rires. Lire à haute voix et bien articuler une dizaine de pages d’un livre que leur mère propose. Elle écoute son frère et le corrige en riant. Puis à son tour son frère l’écoute et la corrige. Des moments merveilleux. Chaque lecture de paragraphe est suivie de taquinerie. Leur mère est presque complice mais c’est un temps de plaisir et de tendresse d’avoir ses enfants s’instruire avec elle.
Lire puis écrire. Séance destinée à réécrire ce qui a été lu. Un bon procédé. Devenu un rituel ayant donné à chacun le goût de lire. Aussi, ce fut intéressant pour leur mère de reprendre la lecture ensemble en une seule voix. Comme au théâtre avec le petit bruit de la règle pour lancer la lecture. Un, deux, trois. Elle écoute sans faire de pression. Et pour écrire, les cahiers avec les prénoms écrits sur la couverture. Le bleu pour le frère et le vert pour la sœur. Vert comme les feuilles des fruitiers de leur verger. Vert vraisemblablement comme le parfum du pêcher près de l’entrée du pigeonnier. Le bleu comme la couleur du ciel pour le frère car il aime bien l’observer dès qu’il a l’occasion. Application sérieuse pour la lecture et l’écriture. Des caractères d’écriture complètement différents. Ah, qu’est-ce qu’ils se chamaillaient ces enfants. Ils se souviennent d’un de leur exercice : l’histoire de Pinocchio. Eh oui, l’école a été en français à l’époque. Mais leur mère a beaucoup tenu à leur faire connaître l’histoire des Contes malgaches par exemple : Ikotofetsy sy Imakaha, la géographie de Madagascar, la carte et les noms de tous les fleuves … Quelques années après, leur père leur acheta en plus des livres non scolaires : Tintin, Akim, Bleck le Roc … car ils ont été encore accessible à ce moment. Etre inscrits et emprunter des livres au Centre Culturel Albert Camus leur a été précieux. Lorsque le CCAC organisa une performance par un acteur français en récitant l’Evangile de Marc en entier, ce fut un régal et un encouragement pour Julia Art’Malala.
Maintenant, un peu de calligraphie ! Avec trois outils : un crayon bien taillé car Julia Art’Malala aime collectionner les minuscules copeaux. Elle adore écrire. Monter les lettres avec légèreté et descendre en appuyant. Le gras bien distinct. Quelle gymnastique. Quel doigté. Et la plume ! Un plaisir pour la tremper dans l’encre. Oh, elle aime tellement écrire. « Mon frère et moi ont reçu ces temps de lecture et d’écriture comme un héritage abondamment riche » dit-elle un jour. A cause des épreuves de la vie arrivées subitement à nos parents, il a fallu persévérer pour poursuivre ce cheminement. Nous remercions de tout cœur nos parents pour la transmission d’une culture que nous avons acquis en très peu de temps. » Puis elle enchaîne « Quand je repense à ces moments inoubliables. J’ai compris plus tard pourquoi je n’écris toujours pas avec le même crayon ou le même stylo. Ce sont comme des pinceaux de peinture qu’il faut alterner. C’est le temps du début – le signe de quelques traces de la vie pour l’avenir ». Même avec la technologie bien avancée grâce à l’ordinateur.Elle cumule encore des cahiers pour écrire
La Dua Story
Ma cité
Mon ami, je sais, je sais,
Je comprends que tu es fâché
Parce que ta cité a perdu sa beauté.
C’est là que tu as été bébé
C’est là que tu as rêvé
C’est là que tu as pleuré
Je sais, je sais
Tu aimes ta cité ;
Aime-la
Ne baisse pas les bras
Tu sauras lui rendre sa beauté
Tu es fier de la réhabiliter
Arrose-la de joie, de bonheur
Ne la laisse pas mourir
Sème-la d’amour
Afin qu’elle puisse refleurir.
Tu sais en marchant dans ta cité,
Renouvelée
Le ciel ne sera plus voilé
Ton jardin sera étoilé
D’enfants, de parents bien aimés
Alors, va, aime ta cité
Avec ton père elle sera paix, paix,
Avec ta mère sera hospitalité, hospitalité,
Avec ton frère elle sera relevée, relevée,
Avec ta sœur elle sera honorée, honorée
Avec toi, elle sera admirée, admirée
Avec nous tous elle sera illuminée.
Alors va mon ami aime ta cité.
Personne ne pourra l’oublier
Car elle est aimée
J’irai la visiter car tu m’as invitée
Alors, arrête de pleurer,
Moi aussi j’aime ta cité. Notre cité
Julia Art’Malala
Nancy. 22/11/2006
Tantanran’ny
Fiangonana Malagasy
tamin’ny
andron-dRANAVALONA II
Concernant le livre « REBIK’ONDRY »
Julia Art’Malala (J.D.) et Laza RAFENONIRINA (RAMY-LAZA) sont co-auteurs du livre ny REBIK’ONDRY.
Tous les deux sont passionnés d’histoire. La rédaction du livre en 1975 a été une épreuve car à l’époque ce fut le temps des couvre-feux à Madagascar. Beaucoup d’insécurité. Les bibliothèques et les archives n’ont été ouvertes que le matin. Habitant près de l’aéroport d’Ivato à l’époque il fallait persévérer pour aller en ville, à la bibliothèque nationale, aux archives de la FJKM à Imarivolanitra, au département des archives à Tsaralalana. Les photocopieurs n’existaient pas encore. Il fallait tout écrire en copiant à la main toutes les documentations. Le livre a été ronéotypé en 15 exemplaires. Puis en 2000 lors d’un voyage à Madagascar pour l’enterrement d’un proche, ils profitent de publier le livre en passant par l’édition Antso d’Imarivolanitra. 1000 exemplaires ont été édités. Il ne reste plus qu’une quinzaine actuellement. Le regretté professeur RAHAINGOSON Henri faisait de ce livre un livre de chevet disait-il. Il en avait un dans son bureau à Ankatso et un autre chez lui. Lui-même a encouragé RAMY-LAZA de rééditer ce livre.
Ce qui a intéressé les deux auteurs c’est l’histoire de l’Eglise malagasy du temps de RANAVALONA II (1868- 1889).Le livre s’intitule « NY REBK’ONDRY » où des missionnaires, des pasteurs, des écrivains, des
journaux avec des auteurs qualifiés ont donné la définition du terme et ses conséquences. Rares sont les ouvrages concernant ce sujet. Il fallait rassembler les articles écrits par-ci par-là. RANAVALONA I la reine-mère est introduit dans ce livre car cela permettait de suivre et comprendre le déroulement de l’histoire de la vie de l’Eglise à cette époque.
D’un côté la formation de la vie de l’Eglise a pris une place importante, ainsi que le projet d’évangéliser le pays. La formation de vrais responsables ou pasteurs étaient nécessaires. D’un autre côté les voies de communication posaient des difficultés pour tous.
Cependant, RANAVALONA II a été une reine intelligente en sachant trouver et appliquer de vraies réformes au niveau de l’Etat et de son gouvernement. Une femme ayant des idées claires. Ferme et non
influençable. Même si nous n’étions pas en Europe la laïcité a eu une longueur d’avance dans son esprit. Alors comment expliquer pourquoi le REBIK’ONDRY a été un frein ou un moteur du christianisme à Madagascar. Découvrez-le dans ce livre.
Une 2 ème édition en malgache va bientôt sortir.
Une traduction en langue française est en cours.
Ecrit par La Dua Story.